Découvrir ou redécouvrir Gérard Conoir, artiste peintre

Gérard CONOIR est né en milieu rural le 7 mai 1933 à Québriac (Bretagne), « jeune garçon grandi ‘‘au cul des vaches’’ » comme il aimait le rappeler. Nous avons pu voir l'un de ses tableaux représentant l'église, lors des Journées Européennes du Patrimoine de 2011.


Maison habitée par les Conoir, 2 route de Pignochet
Maison habitée par les Conoir, 2 route de Pignochet

C’est dans la baie du Mont-Saint-Michel, à Saint-Jean-le-Thomas que ses parents viennent s'installer en 1947. Le père de Gérard, Albert, est boulanger à Granville. La famille décide de vendre la boulangerie et de vivre à Saint Jean le Thomas, 2 route de Pignochet, dans une maison, les Lotus qui comporte plusieurs appartements. Ceci leur permet de louer un certain nombre d'appartements à des touristes ( des baigneurs, comme on disait à l'époque ) pour faire vivre la famille. Les Lotus est comme on dit : " une maison de rapport ".
De plus, Albert assure aussi l'entretien de jardins et forme Gérard à cette activité.



Gérard fréquente l'école du village. ( C'est à l'école dans les années 40 - 50, que je fais sa connaissance avec d'autres écoliers. Je m'appelais à cette époque AUVRAY Roberte.)


Après avoir fait office de mécanicien et de vacher, Gérard, qui a quitté l’école sans même le certificat
d’études, effectue des travaux de jardinage dans plusieurs propriétés du village.


Maison d'Anacréon, 6 route de Pignochet
Maison d'Anacréon, 6 route de Pignochet
Une rencontre importante :
Gérard fait la connaissance de Richard Anacréon. À certaines périodes de l’année, ce dernier y occupe au 6 route de Pignochet, une demeure avec son compagnon, André Lecomte (1907-1982), à deux pas de la maison où s’est établie la famille Conoir .

Gérard fait du jardinage chez  Anacréon. « Je jouais du râteau et de la binette sans me soucier du petit homme à l’œil vif, nez en bec d’aigle, flanqué de sa chienne, qui venait de temps à autre me voir travailler. Il n’obtenait que des monosyllabes en réponse à ses tentatives de dialogue. Comment aurais-je pu bavarder avec un libraire parisien, personnage lointain et mythique à mes yeux, même si j’ignorais qu’il portait le nom d’un poète grec antique ? »

" L'illustration " datée du 3.07.1909
" L'illustration " datée du 3.07.1909

La naissance d’une vocation :

C’est grâce à des numéros de L’Illustration, découverts dans le grenier d’une autre habitation, que Conoir a découvert l’existence des arts plastiques : « S’ouvrait à moi un monde nouveau qui me touchait profondément : la peinture et la sculpture des musées, évoquées dans quelques-uns des articles. N’ayant jamais eu l’occasion de voir des tableaux, je n’aurais pu les juger, mais certains m’attiraient plus que d’autres. Armé de ciseaux, je découpai plusieurs de ces reproductions dont la mise en page évoquait aussi des encadrements et les fixai au mur dans ce coin de la salle commune, chez mes parents, qui m’était réservé. Ce furent des portraits d’hommes, au crayon, par Clouet. » Parfois invité à prendre l’apéritif par Richard et André, qui vivent assez ouvertement leur homosexualité, l’adolescent découvre de vraies œuvres accrochées aux murs ; pour la première fois aussi, il entend la voix d’un chanteur d’opéra, celle du ténor Georges Till (1897-1984). 


Tableau de Gainsborogh, Mme Robinson figurant dans la revue "l'Illustration"
Tableau de Gainsborogh, Mme Robinson figurant dans la revue "l'Illustration"
Anacréon persuade Gérard, pas encore âgé de dix-neuf ans – nous sommes en 1951 –, de ne pas se contenter de consacrer son temps et son existence à des travaux de journalier. Il téléphone à Henri Flammarion (1910-1985). Deux semaines plus tard, Conoir, qui ignore à vrai dire ce qu’est un éditeur, est embauché comme metteur à part au sein de cette célèbre maison parisienne, autrement dit plus ou moins comme magasinier. Il quitte la Normandie contre l’avis de ses parents. Dans la capitale, Richard et André lui achètent de quoi se vêtir car le garçon n’a emporté, dans sa valise, qu’un bleu de travail ! Les bureaux de Flammarion étant situés rue Racine, à une ou deux encablures de L’Originale, la librairie devient le point de ralliement du provincial.
Il a soif de s'arracher à son monde rural en Normandie. La rencontre improbable avec un libraire collectionneur, le projette dans le monde de l'écriture et des arts à Paris au coeur de de Saint-Germain -des- Prés. Ce déracinement va exacerber sa soif de culture et développer ses passions.
Installé au coeur de l'édition pendant des années, il côtoie les écrivains du moment tel Mac Orlan, Paul Valéry, Colette...Il entre avec Anacréon et tant d'autres dans le petit monde de Saint-Germain-des-Prés, tant au niveau de
l'édition, la littérature que la peinture. Il développe ses talents de dessinateur et d'aquarelliste. Il offre à la mairie
de Saint Jean le Thomas un tableau représentant l'église qui a été exposé lors de l'exposition " Les peintres de Saint Jean". Sa passion d'artiste ne l'a jamais quittée puisqu'il a continué, dans un mode le plus souvent non figuratif, à peindre toute sa vie (parfois sous un pseudonyme) et une exposition posthume lui a d'ailleurs rendu hommage à Montauban.

villa -les Lotus- au balcon
villa -les Lotus- au balcon

La rencontre avec Luce :

C’est sans doute en sortant de L’Originale ou s’y rendant, que Gérard est appelé à la rescousse, à deux pas de là – au numéro 30 de la rue de Seine , par deux sœurs en pleine discussion : Luce, qui occupait alors un emploi d’assistante dans ce lieu, ne se satisfait pas de son nez qu’elle souhaite soumettre à une opération esthétique. Elle sollicite l’avis de ce jeune homme qui vient à passer, lequel milite plutôt pour qu’elle ne touche pas à cet appendice.

Comme on lui avait offert deux billets pour aller voir Les Enfants du paradis, Gérard s’empresse d’inviter Luce et son nez au cinéma. La légende familiale veut qu’à la sortie de la séance, il ait fait sa demande en mariage. Après une attente de deux ou trois semaines, un « oui » vint consacrer cette « rencontre amoureuse fulgurante ».


un clic sur la photo pour l'agrandir
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Le mariage :

Les formalités civiles une fois remplies à la mairie du VIe arrondissement de Paris, les tourtereaux se marient en septembre 1959 dans la petite église de Saint-Jean-le-Thomas.
Ils passeront soixante ans ensemble. Ils auront deux enfants : Yvan et Ann.

 


Ils ouvriront à Montauban une librairie et une galerie d'arts : le SCRIBE
Puis, dans les années 90, à la suite de leur départ à la retraite - et donc de la vente de la librairie - ils créent une autre galerie : le SPHINX. 

Gérard CONOIR s'est éteint à Montauban en 2023. 
A l'instar de son épouse Luce,
décédée en 2018Gérard Conoir laisse dans la tristesse ses amis ainsi qu'une multitude de collectionneurs et lecteurs montalbanais qu'il a accompagnés pendant plus de 50 ans.



 


En souvenir de leur père, Yvan et Ann ont décidé d'offrir à l'église de Saint Jean le Thomas un tableau de Gérard représentant un Christ en croix que vous pourrez bientôt admirer dans notre petite église.

Textes et photos : Anne et Yvan CONOIR
Mise en ligne et photos : Roberte Nourrigat
 


 


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